Certaines cibles de la stratégie tarifaire américaine visant à « choquer et à ébranler » passent du déni et de la colère à l’acceptation et même à la résistance, repoussant les exigences de Washington et lançant de nouvelles zones d’échanges commerciaux entre les économies d’Asie et d’Europe.
Le Japon est aux premières lignes de ces négociations tarifaires. La semaine dernière, le président américain Donald Trump a participé à une réunion de 50 minutes avec le principal négociateur japonais en matière de droits de douane, Akazawa Ryosei.
M. Akazawa, qui a ensuite été vu avec une casquette arborant le slogan Make America Great Again à la Maison-Blanche, a déclaré à ses interlocuteurs américains que leurs politiques étaient « extrêmement regrettables » et qu’il les « encourageait vivement à changer de trajectoire ». Le premier ministre japonais, Ishiba Shigeru, a admis que les discussions bilatérales restaient « difficiles ». Il a affirmé cette semaine qu’il ne céderait pas à toutes les demandes de M.Trump.
Dimanche, M.Trump a publié des exemples de « tricheries non tarifaires », comme la manipulation des devises, le transbordement et, en prenant l’exemple du Japon, les « normes techniques de protection ». Donald Trump a déjà demandé à Tokyo d’augmenter ses dépenses en matière de défense et s’est récemment plaint de « payer des centaines de milliards de dollars pour les défendre, sans qu’ils paient quoi que ce soit ».
Droits de douane et railleries refroidissent l’attitude des Japonais à l’égard des États-Unis
Ces attaques, associées à d’autres mesures controversées de l’administration Trump, semblent éroder la réputation des États-Unis au Japon : un nouveau sondage Ipsos montre que seulement 47 % des Japonais interrogés pensent que les États-Unis auront une « influence positive » sur les affaires mondiales au cours de la prochaine décennie, une baisse de 20 points de pourcentage par rapport à octobre 2024. (La confiance des répondants canadiens envers les États-Unis a chuté à 19 %.)
Le journal japonais Asahi Shimbun a quant à lui imploré M. Ishiba de « remettre en question autant que possible les politiques biaisées et la compréhension [de M. Trump] », qualifiant ses tactiques commerciales de « scandaleuses ».
Le même journal a publié les résultats d’un sondage indiquant que 70 % des électeurs japonais sont « pessimistes » quant à la possibilité que M. Ishiba – dont le gouvernement est de plus en plus impopulaire à l’intérieur du pays – négocie un bon accord avec M. Trump. Politico a affirmé mercredi qu’aucun véritable accord commercial ne verrait le jour avant plusieurs mois, mais que les deux pays pourraient bientôt signer un accord de portée plus générale.
Mardi, le Fonds monétaire international a réduit les prévisions de croissance du Japon pour 2025 à 0,6 %. Le PIB du Canada devrait augmenter de 1,4 %.
Lawrence Wong joue les entremetteurs
Pour certains, le « Jour de la libération » de M. Trump a sonné le glas du commerce mondial fondé sur des règles : le premier ministre singapourien Lawrence Wong a déclaré, à la suite des annonces de Donald Trump, que « nous [entrions] dans une nouvelle ère des affaires mondiales – une ère plus arbitraire, plus protectionniste et plus dangereuse ».
Tout n’est pas perdu pour autant : lors d’une conférence de grande envergure la semaine dernière, M. Wong a reconnu que les « États-Unis avaient de plus en plus tendance à se replier sur eux-mêmes », mais a encouragé les autres pays à « renforcer le système commercial multilatéral ». Il a proposé un partenariat officiel entre les 12 économies membres de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP) et l’Union européenne, qui compte 27 membres.
Le premier ministre néo-zélandais Christopher Luxon a lancé la même idée au début du mois. Ensemble, ces zones d’échanges représenteraient environ 35 % de la production économique mondiale.
Le Canada, en tant que membre du PTPGP et signataire de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne, pourrait jouer un rôle clé dans la fusion des deux zones.
Le chef des libéraux, Mark Carney, et celui des conservateurs, Pierre Poilievre, se sont tous deux engagés, s’ils sont élus, à développer et à diversifier les échanges commerciaux du Canada à l’étranger. Le programme de M. Carney prévoit de « renforcer les liens avec nos partenaires en Europe et en Asie », tandis que le plan de M. Poilievre prévoit un « accord de libre-échange et de mobilité » avec le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.