Lundi après-midi, l’application des tarifs douaniers généralisés imposés sur le Canada par le président américain Donald Trump a été reportée de 30 jours, après que Washington et Ottawa ont conclu un accord qui prévoit que le Canada renforcera la surveillance à la frontière pour contrer le crime organisé, le flux de fentanyl et le blanchiment d’argent.
Trump était prêt à pénaliser le Canada sur la base d’accusations douteuses de laxisme en matière de lutte contre la drogue et d’immigration illégale, ce qui aurait constitué une violation de l’accord commercial du continent, l’Accord Canada–États-Unis–Mexique, négocié par Trump lui-même en 2020.
Même si l’application des tarifs douaniers a été reportée, des dommages importants ont été causés, et les consommateurs et les entreprises de tout le pays sont désormais conscients des dangers d’une dépendance excessive à un seul partenaire commercial qui peut parfois se montrer inflexible.
La Chine se prépare
Trump a également imposé des droits de douane de 10 % sur tous les produits chinois. Beijing s’est d’abord engagée à intenter une action en justice auprès de l’Organisation mondiale du commerce, une démarche largement symbolique en raison du mécanisme dysfonctionnel de règlement des différends de l’OMC.
Mais après l’entrée en vigueur des tarifs douaniers de Trump mardi matin, Beijing a riposté en annonçant des droits de douane de 10 à 15 % sur certains produits américains, notamment le charbon, les automobiles, les machines agricoles et le pétrole, qui entreront en vigueur le 10 février. Les autorités chinoises ont également lancé une enquête antimonopole contre Google.
Les tarifs douaniers de 10 % imposés à la Chine sont inférieurs aux 60 % évoqués par Trump lors de sa campagne électorale, ce qui laisse supposer qu’il souhaite, pour l’instant, éviter une rupture totale des relations et garder une marge de manœuvre pour la conclusion d’accords sur des questions telles que TikTok.
Les entreprises chinoises ont appris à ne pas dépendre que des États-Unis pendant le premier mandat de Trump : selon The Financial Review, « en 2017, la Chine a exporté 2,70 $ US vers les économies émergentes pour chaque 1 $ US vers les États-Unis, et aujourd’hui, ce rapport est de 4,25 $ US pour 1 $ US ». De plus, les exportations chinoises de marchandises vers les États-Unis ne représentaient que 3,0 % du PIB de la Chine en 2022.
Le Japon regarde d’un œil inquiet
Les menaces de Trump à l’encontre du Canada montrent aux partenaires de l’Indo-Pacifique que, contrairement à qu’on peut penser des relations internationales, même en étant « à table », on peut être au menu.
Le Japon, cinquième partenaire commercial des États-Unis, est « à fleur de peau » et espère également échapper à la tempête tarifaire de Trump. En 2023, le déficit commercial de marchandises des États-Unis avec le Japon était de 71,2 milliards $ US. Le premier ministre japonais Ishiba Shigeru sera à Washington, D.C. pendant trois jours à compter de jeudi. Il devrait discuter avec Trump de la sécurité économique et de la stabilité dans le détroit de Taïwan.
D’autres partenaires commerciaux des États-Unis dans l’Indo-Pacifique pourraient également être menacés. En 2023, le déficit de marchandises des États-Unis avec le Vietnam s’élevait à 104,6 milliards $ US, le troisième plus grand déficit de tous les pays, après la Chine et le Mexique.
La diversification comme moyen de défense
Le Canada dépend beaucoup plus du commerce et des investissements américains que la Chine : en 2023, les exportations canadiennes vers les États-Unis représentaient près de 20 % du PIB du Canada.
En 2023, selon les données d’Investment Monitor de la FAP Canada, seulement 4 % du commerce de marchandises du Canada ont été réalisés avec les sept économies asiatiques signataires de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste; près de 67 % ont été réalisés avec les États-Unis et le Mexique.
De plus, les comptes américains d’investissement étranger direct représentent plus de la moitié de tous les investissements au Canada. Même si l’application des tarifs douaniers est reportée, les investissements étrangers directs provenant du Japon, de Chine et d’Australie, qui s’élevaient à 114,2 milliards $ CA en 2023, pourraient diminuer si la volatilité persiste entre le Canada et les États-Unis.