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Le nouveau groupe de travail « Femmes, paix et sécurité » du Japon : une opportunité pour le Canada

À RETENIR

Le 29 janvier, le Japon a créé un groupe de travail sur l’agenda « femmes, paix et sécurité » (FPS, WPS en anglais) afin de mieux coordonner les efforts du ministère des Affaires étrangères et du gouvernement japonais en matière de FPS, en particulier en ce qui concerne le soutien à la participation des femmes, tant au niveau national qu’international, à la prise de décisions liées à la prévention des conflits, au maintien de la paix et à la consolidation de la paix.

Ce groupe de travail — et l’engagement actif de la ministre des Affaires étrangères Kamikawa Yoko, première femme ministre des Affaires étrangères du Japon en 19 ans — offre des possibilités de collaboration avec le Canada. L’agenda FPS est une priorité clé pour Ottawa et figure à la fois dans sa Stratégie pour l’Indo-Pacifique et dans le plan d’action Canada-Japon comme un domaine de coopération plus étroite. 
 

EN BREF

  • Le nouveau groupe de travail du Japon sur les femmes, la paix et la sécurité relève de la compétence de Mme Kamikawa et impliquera des fonctionnaires de l’ensemble du gouvernement japonais. Cette initiative intervient près de 24 ans après l’adoption par le Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU) de la résolution 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité (FPS), qui a fait date et qui exhorte « les acteurs à accroître la participation des femmes et à intégrer la dimension de genre dans tous les efforts de paix et de sécurité des Nations Unies ». Les résolutions ultérieures du Conseil de sécurité des Nations Unies ont chargé les États membres de collaborer avec des experts et la société civile pour élaborer des plans d’action nationaux (PAN).
  • Le gouvernement japonais a élaboré des PAN en 2015, en 2019 et, plus récemment, en 2023. Ces plans, élaborés en consultation avec la société civile japonaise et les organisations non gouvernementales (ONG), ont pour objectif de soutenir et de renforcer la participation des femmes à la prévention des conflits et à la consolidation de la paix, de fournir une aide humanitaire axée sur les femmes et d’utiliser des perspectives de genre pour le relèvement et la reconstruction dans les zones de conflit. En outre, le Japon a inclus dans ses PAN des initiatives qui s’appliqueront à ses efforts nationaux et internationaux de réponse et de récupération en cas de catastrophe naturelle. 
  • En 2023, une ONG de premier plan, la Fondation Sasakawa pour la paix, a organisé une série d’événements connexes, dont l’un réunissait la ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, l’ambassadrice FPS, Jacqueline O’Neill, et l’ambassadeur du Canada au Japon, Ian McKay.

IMPLICATIONS

  • Mme Kamikawa, ministre et femme politique expérimentée, compétente et énergique qui a occupé plusieurs postes ministériels depuis 2007, prend le dossier FPS au sérieux. Depuis sa nomination au poste de ministre des Affaires étrangères en septembre 2023, elle a déclaré à plusieurs reprises que FPS serait une initiative clé non seulement pour son ministère et pour la coopération interministérielle, mais aussi pour la diplomatie internationale du Japon.  
  • Le groupe de travail est peut-être nouveau, mais le Japon est un leader mondial de l’aide au développement à l’étranger (23,7 G$ CA en 2022) depuis les années 1980 et est depuis longtemps un généreux donateur et un partisan de diverses agences de l’ONU, telles qu’ONU Femmes, qui travaillent sur la question FPS. En 2021, le Japon était le neuvième contributeur d’ONU Femmes et, par l’intermédiaire de cette agence, il s’est efforcé de « lutter contre la violence sexiste et de la réduire, de prévenir l’extrémisme violent et de promouvoir l’autonomisation économique des femmes en Afrique, au Moyen-Orient et dans la région Asie-Pacifique ». L’Agence japonaise de coopération internationale, qui gère l’APD du Japon, devrait intensifier ses programmes liés à l’agenda FPS, notamment en soutenant le renforcement des capacités des femmes dans les zones de conflit ou d’après-conflit. Le Japon a envoyé des centaines de femmes des forces d’autodéfense pour participer à des activités internationales telles que les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et les activités de secours en cas de catastrophe. 
  • Mme Joly a souligné que le programme FPS était essentiel à la politique étrangère féministe du Canada et à sa Stratégie pour l’Indo-Pacifique. Cependant, il peut s’avérer difficile d’adopter des approches sexospécifiques et féministes dans de nombreuses régions de l’Indo-Pacifique, compte tenu des divergences de vues sur la question du genre et du fait que d’autres questions peuvent avoir une plus grande priorité pour certains partenaires régionaux. Néanmoins, la collaboration avec le groupe de travail japonais FPS, tant dans la région indo-pacifique qu’au-delà, peut contribuer à stimuler les efforts du Canada et à approfondir les liens entre le Canada et le Japon.

PROCHAINES ÉTAPES :

1. Le Japon va nommer un ambassadeur FPS

Une initiative clé pour soutenir les efforts du Japon en matière de FPS est la création d’un poste d’ambassadeur FPS, annoncée par Mme Kamikawa lors de sa visite en Ukraine en janvier. Depuis 2019, le Canada dispose d’une ambassadrice pour les femmes, la paix et la sécurité, Jacqueline O’Neill, dont le rôle est de fournir des conseils interministériels et de rehausser le profil des PAN du Canada. L’équipe de Mme O’Neill pourrait offrir des conseils précieux et des bonnes pratiques pour guider Mme Kamikawa dans la création de ce rôle crucial.

2. Opportunité pour la mise en œuvre d’une stratégie commune dans l’ANASE et en Ukraine ?

Le plan d’action Canada-Japon d’octobre 2022 mentionne la question FPS comme un domaine de collaboration.  Mme Kamikawa et Mme Joly ont reconfirmé leur intérêt pour l’approfondissement de la coopération bilatérale lors de leurs rencontres en novembre 2023 et en janvier 2024, notamment en ce qui concerne l’agenda FPS dans et avec l’ANASE. Bien que les détails n’aient pas été divulgués, il existe des bases solides sur lesquelles construire des programmes en partenariat. Par exemple, l’année dernière a marqué les 50 ans d’amitié et de coopération entre le Japon et l’ANASE et Mme Kamikawa a mené des discussions sur la question FPS avec plusieurs homologues de la région.  Le Japon pourrait également se joindre au projet lancé conjointement par le Canada, l’ANASE et ONU Femmes, intitulé « Miser sur les femmes pour une paix durable : prévenir la violence et promouvoir la cohésion sociale » (en anglais Empowering women for sustainable peace: Preventing violence and promoting social cohesion in ASEAN). Le nouveau groupe de travail du Japon pourrait également offrir des opportunités concrètes, notamment lors de la conférence internationale annuelle de l’Assemblée mondiale des femmes : WAW! (de l’anglais, World Assembly for Women), ainsi que sur le redressement et la reconstruction de l’Ukraine, un domaine de prédilection de Mme Kamikawa.