Democracy Summit

L’IA au cœur de ce nouveau Sommet pour la démocratie, qui souligne le rôle de plus en plus important de Séoul, pays hôte, dans le monde

À retenir

Le troisième Sommet international pour la démocratie, qui s’est tenu à Séoul, en Corée du Sud, du 18 au 20 mars, a mis l’accent sur le rôle que jouent l’intelligence artificielle et la technologie numérique tant dans le renforcement que dans la menace de l’intégrité démocratique. Parmi les autres thèmes abordés figuraient la lutte contre les interventions électorales numériques et la consolidation de la coopération internationale pour relever les défis géopolitiques.

En bref

  • Les États-Unis ont inauguré le Sommet en 2021 en tant « qu’initiative présidentielle phare » de l’administration Biden. Le premier rassemblement a eu lieu fin 2021, et le second en mars 2023, tous deux accueillis par les États-Unis. Le Sommet organisé par la Corée du Sud — en partenariat avec le Danemark et le Kenya — revêt une importance particulière, car il s’agit du premier sommet organisé en dehors des États-Unis. 
  • Quelque 300 délégués ont assisté à la réunion de cette année, représentant des gouvernements, des organisations internationales, la société civile et le secteur privé. Plusieurs chefs d’État et hauts fonctionnaires y ont également participé, notamment le président sud-coréen Yoon Seok Yeol, le secrétaire d’État américain Antony Blinken et l’ambassadeur du Canada au Japon et envoyé spécial pour l’Indo-Pacifique, Ian McKay, qui était présent en personne. 
  • Le premier ministre canadien Justin Trudeau, le premier ministre japonais Kishida Fumio et le premier ministre indien Narendra Modi ont prononcé des allocutions virtuelles.
  • M. Trudeau a annoncé un financement de plus de 30 M$ CA pour de nouveaux projets, dont 22,3 M$ CA  pour des initiatives visant à défendre les droits de la personne et à promouvoir l’inclusion, 5,6 M$ CA pour renforcer des institutions démocratiques solides et 2,5 M$ CA pour lutter contre l’ingérence étrangère.

Implications

Le fait que la Corée du Sud soit l’hôte du sommet témoigne de l’ambition du pays de devenir un « État pivot mondial » qui ne se contente pas de soutenir et de faire respecter les types de normes mondiales dont il a bénéficié, mais qui contribue également à faire avancer les initiatives qui s’y rapportent. 

Summit for Democracy 2024
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken (2e à gauche) serre la main du président sud-coréen Yoon Suk Yeol lors du troisième Sommet pour la démocratie à Séoul, le 18 mars 2024. | Photo : Evelyn Kockstein/POOL/FAP via Getty Images

La Chine s’est opposée au sommet dès sa création et le considère comme un mécanisme permettant de créer des « coalitions anti-Chine ». Cette année, la ministre taïwanaise des affaires numériques, Audrey Tang, s’est adressée aux participants et a souligné que Taïwan était confronté à un nombre disproportionné de cyberattaques. Elle a ajouté que l’IA pourrait amplifier les défis pour les nombreuses élections qui auront lieu dans le monde en 2024 et a ajouté que les réglementations taïwanaises en matière d’IA pourraient contribuer à l’élaboration de normes mondiales. Mme Tang a également fait référence aux « mauvais acteurs » qui ont tenté d’influencer les élections présidentielles et législatives de janvier 2024 à Taïwan, une allusion à peine voilée à la Chine. Comme prévu, Pékin a réagi vivement à la présence de Mme Tang au sommet de cette année.

Quelle est la suite :

1 L’obligation d’aller jusqu’au bout 

Si les pays participants ont pris des engagements généraux en faveur de la sauvegarde des valeurs démocratiques et des droits de l’homme, la spécificité et la force de ces engagements varient. 

En effet, certains délégués des années précédentes ont insisté sur la nécessité pour les participants d’assurer le suivi des engagements antérieurs, en particulier ceux liés à la réforme anticorruption et à la protection de l'intégrité des processus politiques. Il faudra déployer des efforts similaires pour assurer le suivi des engagements pris lors de l’événement de cette année.

2 La collaboration Canada-Japon-Corée du Sud

Le Sommet pourrait servir de catalyseur à un cadre de collaboration internationale visant à renforcer la démocratie, en mettant en évidence le potentiel d’un partenariat trilatéral entre le Canada, le Japon et la Corée du Sud. Une possibilité serait de travailler ensemble pour faire avancer la « Déclaration mondiale sur l’intégrité de l’information en ligne » issue du Sommet de l’année dernière, qui vise à promouvoir le développement responsable de l’IA et à renforcer les institutions démocratiques, en accord avec les engagements pris par le Canada pour contrer l’ingérence étrangère. 

D’autres initiatives clés pourraient porter sur l’élargissement du cadre stratégique global du processus d’IA d’Hiroshima du G7 — un cadre international pour des systèmes d’IA avancés sûrs, sécurisés et dignes de confiance — et sur l’exploitation des conseils stratégiques sur l’IA en Corée du Sud et au Japon pour des initiatives conjointes visant à soutenir et à protéger les pratiques démocratiques.

3 Défis et opportunités pour les futurs sommets

Le Sommet pourrait renforcer les alliances entre les démocraties et ouvrir de nouvelles voies pour collaborer à des objectifs démocratiques communs. Par exemple, le sommet pourrait ouvrir la voie au renforcement d’alliances telles que le groupe « D-10 » (Démocratie-10), composé de grandes démocraties comme le Canada, l’UE, le Japon, la Corée du Sud et les États-Unis.

Les membres de ce groupe pourraient collaborer plus étroitement sur les questions soulevées lors du Sommet, telles que la promotion d’élections libres et équitables, la lutte contre les campagnes de désinformation et le soutien aux organisations de la société civile dans ce que l’on appelle le « Sud mondial » et au sein des démocraties émergentes.

Les résolutions du Sommet pourraient également avoir une influence négative sur les relations avec des régimes autoritaires comme la Chine et d’autres pays. Les prochains sommets continueront probablement à mettre l’accent sur l’importance de la société civile, de l’engagement des jeunes et des médias indépendants pour favoriser la confiance démocratique, tout en explorant des modèles qui s’adaptent aux complexités d’un monde multipolaire. Le Canada devrait s’efforcer de partager les enseignements tirés de ses propres expériences sur ces sujets et de tirer les leçons des expériences des autres.

4 Tirer parti du rôle de la Corée du Sud dans les discussions mondiales sur l’IA 

En mai, la Corée du Sud accueillera le deuxième Sommet sur la sécurité de l’IA, axé sur la coopération internationale pour gérer les risques liés à l’IA. Ce sommet et d’autres discussions internationales connexes pourraient bénéficier des retombées du Sommet pour la démocratie.

Tae Yeon Eom

Tae Yeon Eom est chercheur-boursier à la Fondation Asie Pacifique du Canada. Lorsqu'il ne se plonge pas dans ses recherches à la FAP Canada sur les divers défis ou opportunités liés à l'ESG en Corée du Sud et sur les liens entre le Canada et la Corée du Sud, il voyage dans le temps et l'espace au bureau, réfléchissant et écrivant sur les subtilités de l'Asie du Nord-Est.

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