Alors que Donald Trump va plus loin dans l’attaque, l’Inde et la Chine cherchent à enterrer la hache de guerre

Perturbées par l’imprévisibilité et l’animosité du président américain Donald Trump, la Chine et l’Inde se rapprochent pour résoudre des problèmes commerciaux et frontaliers, alors que Donald Trump, qui se tourne peu à peu vers la Russie, crée la confusion géopolitique.

Les relations entre la Chine et l’Inde se sont dégradées à la suite d’affrontements frontaliers meurtriers en 2020. Mais depuis l’automne dernier, les deux pays ont travaillé à réparer leur lien.

En octobre 2024, Beijing et New Delhi ont convenu d’un pacte de patrouille frontalière pour désamorcer les tensions. Le même mois, le premier ministre indien Narendra Modi et le président chinois Xi Jinping se sont rencontrés en personne pour la première fois depuis 2019.

Lundi, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a rencontré M. Modi ainsi que le ministre indien des Affaires extérieures, S. Jaishankar, et le conseiller à la sécurité nationale, Ajit Doval, à New Delhi. Wang Yi et S. Jaishankar ont discuté du commerce et des échanges bilatéraux, tandis que la rencontre entre Wang Yi et A. Doval a constitué le 24e cycle de discussions sur la frontière commune de 3 440 kilomètres dans la relation bilatérale.

S. Jaishankar a déclaré à Wang Yi cette semaine qu’« ayant connu une période difficile dans [leurs] relations, [leurs] deux nations cherchent maintenant à aller de l’avant ». Autre signe d’un dégel, il semblerait que Beijing et New Delhi ont convenu de reprendre les vols directs entre les deux pays « dès le mois prochain ». L’Inde a également recommencé à délivrer des visas aux touristes chinois en juillet, après cinq ans de gel.

Au cours du plus récent exercice financier, le commerce entre la Chine et l’Inde a atteint 127,7 milliards de dollars américains. Le commerce entre les États-Unis et l’Inde au cours de la même période ont atteint 131,84 milliards de dollars américains.

Le levier russe

M. Modi se rendra en Chine fin août pour le sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai, son premier voyage en Chine depuis sept ans. Le président russe Vladimir Poutine y participera également.

L’importation de pétrole russe par l’Inde a provoqué les foudres de Donald Trump, qui a menacé de doubler les tarifs douaniers actuels imposés à l’Inde de 25 % d’ici le 27 août si aucun accord n’était conclu entre les États-Unis et l’Inde. Les espoirs de l’Inde pour une résolution de cette question sont tombés à l’eau après le sommet de la semaine dernière en Alaska entre les présidents Trump et Poutine. Narendra Modi et Vladimir Poutine se sont entretenus lundi.

Pour ne rien arranger, Peter Navarro, le conseiller au commerce de Donald Trump, a rédigé cette semaine une tribune justifiant les tarifs douaniers imminents, montrant que Washington est déterminée à mettre en œuvre sa menace tarifaire. Peter Navarro n’a cependant pas expliqué pourquoi l’Inde était pointée du doigt pour son achat de pétrole russe, alors que d’autres pays, comme la Chine et la Turquie, échappent à des sanctions secondaires.

Le discours sévère de Washington a suscité de vives réactions en Inde. Un nombre croissant de consommateurs indiens boycottent les produits américains, à l’image du mouvement « Elbows Up » (jouons du coude) au Canada, tandis que certains commentateurs indiens suggèrent que les menaces de Donald Trump ont moins à voir avec le « financement de la machine de guerre russe » par l’Inde qu’avec les négociations commerciales bilatérales.

Les deux parties s’ancrent dans leur position : Narendra Modi s’est montré réfractaire jusqu’à présent, et les négociateurs américains, qui devaient initialement se rendre à New Delhi à la fin du mois pour discuter du commerce, ne se rendront pas en Inde de sitôt. Les responsables indiens, quant à eux, doivent se rendre en Russie la semaine prochaine pour des discussions sur le commerce bilatéral.

Le dilemme d’Ottawa

Ottawa est tout aussi perturbée par les tactiques du président américain et s’est empressée de diversifier ses liens commerciaux pour compenser ses relations chancelantes avec Washington.

Le Canada semble « réinitialiser » ses liens avec l’Inde; une étape cruciale à cet égard sera la réintroduction de hauts-commissaires à Ottawa et à New Delhi. Les tarifs douaniers chinois récemment annoncés sur le canola canadien ont quant à eux étouffé tout espoir de « nouveau départ » entre Ottawa et Beijing.

Pour Ottawa, une diplomatie astucieuse et la poursuite de négociations de haut niveau seront nécessaires pour aplanir les relations avec les deux grandes puissances.