Sheikh Hasina condamnée à mort pour la répression en 2024

Sheikh Hasina, l’ex-première ministre du Bangladesh, a été condamnée à mort lundi pour son rôle dans la répression meurtrière des émeutes de 2024, qui ont coûté la vie à environ 1 400 manifestants et fait des milliers de blessés et de victimes d’emprisonnement.

Sheikh Hasina, « la bégum de fer » qui a régné sur le Bangladesh de 2009 à 2024, a été condamnée par contumace par le Tribunal pénal international de Dacca. Ce dernier l’a reconnue coupable d’incitation à la violence, d’ordres de mise à mort et d’inaction face à des exactions.

La « révolution de juillet » survenue l’année dernière au Bangladesh visait d’abord le système controversé de quotas dans la fonction publique, avant de se transformer en un mouvement de contestation plus large contre la stagnation économique, la corruption endémique et les politiques jugées « dictatoriales » de Mme Hasina. Après cinq semaines de manifestations menées par des étudiants, Sheikh Hasina s’est exilée en Inde, où elle a trouvé refuge dans une résidence protégée.

La décision rendue lundi pourrait aider les familles des victimes de la répression orchestrée par Mme Hasina à trouver la paix. Toutefois, elle pourrait aussi provoquer des confrontations brutales entre les partisans et les détracteurs de Mme Hasina, et nuire aux liens entre le Bangladesh et l’Inde.

Sheikh Hasina rejette le verdict

Mme Hasina a qualifié cette décision de « biaisée et fondée sur des motivations politiques ». Elle a déclaré que « [...] qualifier les événements d’attaque préméditée contre la population est tout simplement une interprétation erronée des faits ».

Un rapport publié en février par l’ONU a révélé que le gouvernement de Sheikh Hasina, de concert avec des « éléments violents » associés à la Ligue Awami – le parti de Mme Hasina – « s’est systématiquement livré à de graves violations des droits de la personne, notamment en perpétrant des centaines d’exécutions extrajudiciaires, d’arrestations et de détentions arbitraires, et de tortures ».

En mai, le gouvernement intérimaire du Bangladesh a interdit la Ligue Awami. Cette semaine, le fils de Mme Hasina a affirmé que, si le gouvernement ne levait pas l’interdiction avant les élections de février 2026 au Bangladesh, il y aurait des « affrontements », s’engageant à faire « ce qui sera nécessaire » pour retrouver sa place sur les bulletins de vote.

Un sondage récent mené auprès de 10 413 électeurs bangladais admissibles a révélé que 30,7 % des électeurs sont indécis, tandis que 18,7 % soutiennent le Parti nationaliste du Bangladesh, qui constitue l’opposition principale au parti de Mme Hasina. Par ailleurs, quelque 8,5 % ont déclaré vouloir voter pour la Ligue Awami.

New Delhi refuse l’extradition, pour le moment

Le dirigeant du gouvernement provisoire du Bangladesh, Muhammad Yunus, a déclaré que ce verdict démontre que « nul n’échappe à la loi, quel que soit son statut ». M. Yunus a demandé l’extradition de Sheikh Hasina, mais l’Inde n’a toujours pas donné suite à cette demande.

Mardi, le ministère des Affaires étrangères de l’Inde a réagi à cette condamnation, ajoutant que « l’Inde maintient son engagement pour la protection des intérêts du peuple bangladais ». Une lettre transmise par le ministère des Affaires étrangères du Bangladesh à New Delhi stipule que « fournir un refuge à [Hasina]... constituerait un acte extrêmement hostile et un non-respect de la justice ».

L’extradition de Mme Hasina demeure peu probable à court terme. Un traité d’extradition bilatéral a été signé en 2013 sous la gouverne de Mme Hasina. Les extraditions peuvent toutefois se voir refusées dans le cas d’« infractions de nature politique », ce qui rejoint la version défendue par Sheikh Hasina. (Amnistie Internationale a également qualifié son procès et sa condamnation de « ni équitables ni justes ».)

La pression internationale pourrait contraindre New Delhi à livrer Mme Hasina. L’Inde pourrait également être plus encline à extrader Mme Hasina si un gouvernement stable et démocratiquement élu accède au pouvoir après les élections de février au Bangladesh.

Ottawa n’a pas encore publié de déclaration concernant la condamnation à mort de Sheikh Hasina; M. Yunus attend toujours une rencontre avec le premier ministre canadien Mark Carney. Deux députés libéraux se sont néanmoins rendus au Bangladesh la semaine dernière, où ils ont rencontré M. Yunus pour discuter d’échanges commerciaux et d’autres enjeux. Par ailleurs, le représentant commercial canadien pour l’Indo-Pacifique, Paul Thoppil, a mené une délégation d’affaires à Dacca en mai 2025