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Les pays asiatiques intensifient leurs efforts en faveur de l’action climatique mondiale lors de la COP28

À retenir 

Le 13 décembre, dans un geste historique, 196 pays se sont mis d’accord pour « abandonner les combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques ». Après deux semaines de négociations éprouvantes, la 28e Conférence des parties (COP28) à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a approuvé le résultat du bilan mondial, point culminant du premier examen de l’Accord de Paris de 2015. Des gouvernements de toute l’Asie, une région en développement rapide particulièrement vulnérable aux impacts d’un climat changeant, ont joué un rôle crucial lors de la COP28, en prenant de multiples engagements au-delà du bilan mondial.

En bref

  • Le bilan mondial est un processus biennal qui a lieu tous les cinq ans. Il dresse un « inventaire » des efforts déployés par les pays pour respecter leurs obligations au titre de l’Accord de Paris, l’obligation la plus fondamentale étant de « maintenir l’augmentation de la température moyenne mondiale à un niveau bien inférieur à 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre les efforts pour limiter à 1,5 °C ». Le bilan mondial évalue le chemin parcouru par les pays depuis l’adoption de l’Accord de Paris et les progrès qu’ils doivent encore accomplir sur le plan de l’atténuation, de l’adaptation et de la mise en œuvre. Les parties doivent mettre à jour leur Contribution déterminée au niveau national (CDN) d’ici 2025, un processus qui se fonde donc sur une ambition mondiale et individuelle croissante au fil du temps.
  • Les résultats du premier bilan mondial ont mis en évidence les principales limites de la réponse internationale en matière de prévention et de lutte contre les changements climatiques. Il a notamment été constaté que les CDN ne permettaient pas d’atteindre la trajectoire de 1,5 °C requise par l’Accord de Paris.

  • Il a fallu près de 30 ans pour que la COP inclue explicitement les « combustibles fossiles » dans les textes officiels. Bien qu’elles n’aient pas demandé l’élimination progressive des combustibles fossiles, les parties ont opté pour une « transition vers l’abandon ». La première solution est jugée nécessaire pour rester dans la limite d’un réchauffement de 1,5 °C, tandis que la seconde n’exige pas l’élimination totale des combustibles fossiles. Le résultat du bilan mondial est un instrument non contraignant dont la formulation est faible, en partie en raison de la structure décisionnelle basée sur le consensus dans le cadre de la CCNUCC. Ce type d’instrument propose souvent un « plus petit dénominateur commun » sur lequel les pays peuvent se mettre d’accord.

Implications

Des lacunes subsistent en matière d’atténuation, d’adaptation et de financement. L’insuffisance des CDN a entraîné un « écart d’atténuation » – c’est-à-dire l’écart entre la trajectoire actuelle et la trajectoire 1,5 °C – pouvant aller jusqu’à 45 % des émissions mondiales annuelles. La plupart des pays devraient réduire considérablement leurs émissions, accroître leurs énergies renouvelables et réduire rapidement la déforestation pour atteindre l’objectif fixé par l’accord de Paris. Le bilan mondial a également révélé que l’adaptation, essentielle pour faire face aux effets des changements climatiques, était très « fragmentée, progressive, limitée à certains secteurs et répartie de manière inégale ». L’inclusion insuffisante des communautés locales et la transparence dans la réalisation de cet engagement font défaut. Malgré l’importance accrue accordée au financement de la lutte contre les changements climatiques, il subsiste des failles importantes. Ce financement doit encore faire l’objet d’une « réduction des risques » et l’accès aux fonds internationaux doit être simplifié pour que des progrès soient accomplis dans ce domaine.

Les pays asiatiques se mobilisent lors de la COP28. Malgré les lacunes du résultat du bilan mondial, les pays, en particulier ceux d’Asie, ont pris de multiples engagements, réitérant ainsi leur volonté de renforcer l’action climatique. L’Engagement mondial pour l’accès au froid, signé par 61 pays, dont le Brunei, le Cambodge, Singapour, la Thaïlande, le Vietnam et le Canada, vise à atténuer 68 % des émissions liées au refroidissement (p. ex., la réfrigération et la climatisation) d’ici 2050, tandis que l’Engagement mondial en faveur des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique – axé sur la multiplication par trois de la capacité mondiale en matière d’énergies renouvelables – a été approuvé par le Brunei, la Malaisie, Singapour et la Thaïlande. Parallèlement à ces engagements mondiaux, les pays d’Asie du Sud-Est ont souligné, le 5 septembre, dans une déclaration de la COP28, les progrès réalisés en vue de la création du Centre de l’ANASE sur les changements climatiques à Brunei. Ce centre améliorera la collaboration régionale en matière de climat tout en renforçant le soutien au financement climatique et au développement des technologies propres. Le 2 décembre, le Sri Lanka a annoncé l’initiative d’un forum sur la justice climatique, une plateforme destinée aux gouvernements, aux entreprises et aux parties prenantes afin d’accélérer le financement du climat d’une manière équitable et juste. La Climate Justice Alliance, une coalition de 30 organisations non étatiques bangladaises, a fait pression en faveur d’une transition écologique équitable lors de la COP28, tout en se faisant l’écho des demandes des pays en développement en faveur d’un financement accru de la lutte contre les changements climatiques.

Quelle est la suite

  1. Renforcer l’action climatique d’ici 2025 et la COP29

    Le bilan mondial vise à corriger la trajectoire de l’ensemble des efforts déployés à l’échelle mondiale pour faire face à la crise climatique. Tout en rappelant brutalement que le monde accuse un retard dans l’action climatique, le bilan mondial pourrait servir de catalyseur pour un renforcement des mesures, dont le besoin se fait cruellement sentir. La COP29 se tiendra dans un autre pays pétrolier, l’Azerbaïdjan, et sera présidée par un ancien dirigeant du secteur privé et actuel ministre de l’écologie de l’Azerbaïdjan, Mukhtar Babayev. Cet arrangement suscite déjà des critiques semblables à celles formulées à l’encontre des Émirats arabes unis, hôtes de la COP28.

  2. L’action climatique en Asie, au-delà de la CCNUCC

    Si l’action climatique mondiale reste étayée par la CCNUCC (malgré les critiques formulées à l’encontre de la COP28), des efforts de collaboration à différents échelons systémiques (p. ex., gouvernements, entreprises, universités et société civile) sont néanmoins nécessaires pour trouver des solutions efficaces.

    En 2022, l’entreprise publique Temasek de Singapour a lancé GenZero, une plateforme d’investissement qui finance des solutions climatiques basées sur la nature et la technologie. Cette plateforme, dotée de 5 milliards de dollars canadiens, a investi dans diverses initiatives climatiques en Asie, notamment dans le déploiement de carburants d’aviation durables et dans l’accélération de la mise hors service anticipée des centrales au charbon en Asie du Sud-Est. Des organisations canadiennes telles que le Toronto Centre, quant à elles, dotent les acteurs de la région asiatique d’outils d’aide à la décision visant à réduire les risques liés aux investissements climatiques dans la région, en proposant des programmes de renforcement des capacités et des cours d’analyse des risques qui permettent aux parties prenantes d’effectuer des investissements durables et inclusifs dans le domaine du climat.

• Auteurs : Hema Nadarajah, Sasha Lee, Alberto Iskandar

 

Hema Nadarajah

Ph.D. Hema Nadarajah est Gestionnaire de programme, Asie du sud est, à la Fondation Asie Pacifique du Canada. Elle est titulaire d'un doctorat en relations internationales de l'Université de la Colombie-Britannique, où elle a effectué des recherches sur la gouvernance dans l'Arctique, le changement climatique et l'espace extra-atmosphérique. Ph.D. Nadarajah est conseillère auprès du WWF et a travaillé auparavant pour le gouvernement de Singapour sur des questions de conservation de la biodiversité internationale et de changement climatique.

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Sasha Lee

Sasha Lee est chercheuse post-universitaire au sein de l’équipe Asie du Sud-Est de la Fondation Asie Pacifique du Canada. Elle a obtenu une maîtrise en sciences politiques à l’University of British Columbia et un baccalauréat à la Korea University, avec une double spécialisation en sciences politiques et en communication avec les médias. Ses travaux portent notamment sur les technologies renouvelables et la gouvernance environnementale des pays en développement.

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Alberto Iskandar

Alberto Iskandar est chercheur-boursier à la Fondation Asie Pacifique du Canada. Il a obtenu son diplôme de grade de premier cycle à l’Université Simon Fraser, avec une spécialisation en sciences politiques et une mineure en études internationales, et a été diplômé en 2021. Ses recherches portent sur le multilatéralisme en Asie du Sud-Est et dans l’ANASE, le développement durable et les questions liées à la sécurité et à la défense en Asie du Sud-Est. Il a précédemment travaillé en tant que chercheur fonctionnaire à la Communauté de politique étrangère d’Indonésie (Foreign Policy Community of Indonesia).

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